Faire son déshydrateur de filament
Parmi les solutions pour retirer l’humidité des filaments (voir l’article sur le séchage des filaments), il y en a une qui consiste à adapter un déshydrateur alimentaire.
Personnellement j’ai rarement des cas de filament cassant à cause de l’humidité. Mes filaments sont toujours dans un sac congélation. Mon besoin est donc ponctuel. C’est pourquoi j’ai préféré cette solution plutôt que d’investir dans un appareil dédié style Sunlu ou eSun.
Sommaire
Je n’avais pas vraiment de cahier des charges et mes seules contraintes étaient de ne pas le laisser à côté de l’imprimante (faute de place) et essayer de ne pas prendre de place supplémentaire. Je voulais également avoir un afficheur de température et d’humidité pour ‘surveiller’ les opérations (on reviendra là-dessus). Le déshydrateur alimentaire me semblait donc parfaitement adapté à mes besoins. Bon, d’accord, il prend de la place mais on peut le ranger dans un coin quand on ne s’en sert pas et surtout on peut l’utiliser pour sécher des fruits et des légumes. Opération qui semble plus compliquée avec une box eSun ou Sunlu. C’est dingue le progrès ! Quand j’étais gosse on faisait sécher les fruits au soleil. Maintenant on a une machine pour ça !
Et puis j’avais envie de bricoler un peu (mais pas trop). Finalement, voila ce que ça donne.
Le matériel
Les désydrateurs alimentaires, ont parfois des tarifs qui donnent des sueurs. Pour quelqu’un qui a un grand jardin ou une bonne source d’approvisionnement en fruits et légumes de qualité, cela peut se justifier. Pour du filament, je trouve que c’est inutile et j’ai donc pris un modèle de base très répandu à 30€.
Un aperçu des hauteurs. Le socle fait 10 cm de haut. Chaque clayette fait 3 cm de profondeur. Le couvercle fait 3.5 cm de haut. Naturellement on ne se sert pas de toutes les clayettes.
Pour l’afficheur j’ai choisi, là aussi, un modèle simple à environ 6€. Je ne me faisais pas trop d’illusion sur la qualité du produit en lisant les commentaires mais c’était plus ‘pour faire comme les grands’ (eSun et Sunlu) que pour un véritable usage, puisque je n’ai pas l’intention de passer ma vie à regarder ces paramètres. De plus, sa taille allait bien avec mon idée d’aménagement.
J’ai donc investi au total 35€ dans cette opération. Bien entendu il faut ajouter le prix des impressions des rehausseurs mais c’est négligeable. Comptez dans les 40g par pièce donc donc 160g en tout (pour une impression en 0.28). Un bon moyen de liquider les fins de bobines.
La partie à imprimer
Si vous voyez comment est fait un déshydrateur alimentaire, vous comprenez qu’une bobine ne rentre pas dans une clayette. Il y a 3 cm entre deux clayettes. Largement insuffisant pour une bobine basique qui fait dans les 6cm d’épaisseur. Et même en ne mettant que le couvercle, on ne peut pas fermer la cuve.
Il a donc fallu ruser. J’ai d’abord cherché si je trouvais une solution toute faite sur Cults3d, MyMiniFactory et Thingiverse. Mais à chaque fois je trouvais les rehausseurs trop hauts. Outre que je ne trouvais pas ça beau, je me demandais où j’allais les ranger quand je ne m’en servais pas. C’est pour cela que j’ai décidé de faire mon propre réhausseur.
Mais j’avais le même problème que les copains. La bobine était trop épaisse. J’ai me suis donc dit que ce serait une bonne idée d’utiliser une clayette à l’envers. Et là, pour le coup, je n’avais pas besoin de la surélever beaucoup.
Un petit coup de modeleur 3D paramétrique pour pouvoir ajuster les valeurs en cas de besoin et hop, première impression de test. Croyez-moi ou pas, ça a marché du premier coup. Un conseil au passage. Quand vous dessinez des objets, prenez du temps pour bien prendre les cotes. Vous gagnerez beaucoup de temps plus tard.
J’en ai profité pour faire une pièce pour surélever la bobine afin d’éviter de boucher les ouïes de circulation de l’air qui se trouvent sous elle. J’aurais pu la faire en un seul morceau mais il aurait fallu des supports à l’impression. J’ai préféré deux morceaux à coller une fois imprimés.
Liens pour les stl :
- Cults3d
- MyMiniFactory
- Thingiverse Avec Thingiverse vous aurez souvent une erreur 404, un mystère insondable. Passez plutôt par les autres hébergeurs.
Pourquoi 4 pièces (donc à 90° chacune) et pas une ou deux ? Simplement pour avoir des parties faciles à ranger. Je ne pouvais pas de toute façon imprimer le cercle entier sur le plateau. Et en quatre parties l’impression est possible sur un plateau de Genius ce qui n’aurait pas été le cas en deux parties.
Une fois les 4 pièces imprimées tout était parfait. mais il fallait prévoir une emplacement pour l’afficheur. Il a fallu faire plusieurs essais pour trouver la bonne orientation qui permettait de voir à peu près correctement les valeurs. Au passage merci à la fonction ‘Section de croisement’ d’IdeaMaker (qui existe aussi chez les autres trancheurs) qui m’a permis de n’imprimer qu’une partie de la pièce pour les essais.
Dernier un point à régler : le matériau à utiliser pour ces pièces imprimées. En regardant un peu partout chez ceux qui avaient déjà fait ce genre de bricolage, j’ai vu que la plupart faisaient ça en PETG parce que c’est un matériau qui résiste mieux à la chaleur. Je me suis donc dit que ce serait bien de savoir de quelles températures j’aurais besoin. Le problème c’est que les fabricants donnent des températures proches mais différentes pour le séchage. Après quelques recherches et pondérations je suis parti sur les bases suivantes.
PLA : 55°
ABS : 65°
PETG : 65°
TPU/TPE : 55°,
Nylon : 75°
PVA : 75°
ASA : 65°
HIPS : 65
PP : 55°
PC : 75°
PEEK, PEKK : 75°
Je donne le PEKK pour rigoler vu qu’à 250 ou 500€ la bobine, on doit pouvoir investir dans autre chose qu’un deshydrateur de tomates… En ce qui me concerne, ma bibliothèque de filaments ne devrait pas nécessiter de dépasser les 65°.
A titre d’infos puisqu’on est dans les chiffres, l’humidité idéale dans le filament doit être comprise entre 10% et 13%.
Pour en revenir au matériau, vous me connaissez, ce n’est pas parce que tout le monde dit PETG que je vais utiliser du PETG. J’aurais même tendance à faire le contraire ! Je décidai donc de convoquer une séance de brainstorming avec moi-même sur la question. Après d’intenses tractations, j’en arrivai à la conclusion que :
- Je n’allais donc jamais dépasser les 65°
- Il n’y avait aucun poids sur mes rehausseurs, juste une clayette et un couvercle, soit environ 480 grammes). Ces 480g étant répartis uniformément sur les 32cm de diamètre, soit 1 mètre de périmètre si mes calculs pointus sont bons, soit moins de 5g par centimètre. Pas de risque d’effondrement à mon avis !
C’est pourquoi je décidai d’imprimer en PLA. En plus, je n’avais pas de PETG rouge et je voulais faire mon montage en rouge et blanc pour faire comme la fusée de Tintin. Il faut savoir gérer les priorités !
L’utilisation
On ne peut pas dire que l’utilisation de cet appareil demande un QI particulièrement élevé. Il suffit de poser sa bobine dans la machine de mettre la clayette du dessus et le couvercle. Et encore je ne suis pas sûr que le couvercle soit vraiment utile. Ensuite, il reste à choisir la température. Cet appareil permet de choisir des valeurs entières : 35°, 40°, 45°, 52° (pourquoi 52 et pas 50 ? Ca dépasse mes compétences en déshydratation), 60°, 65° et 70°. Si ces valeurs sont respectées, on peut déjà couvrir pas mal de matériaux.
Hélas, il n’y a pas de minuteur sur ce modèle. Il faut donc, soit se mettre un rappel, soit brancher le déshydrateur sur une prise avec minuteur. Si vous êtes un vrai geek vous pouvez aussi le brancher sur une prise connectée qui vous permettra de déclencher un gyrophare et une sirène 110dB lorsque ce sera fini.
La machine est équipée d’un ventilateur qui n’est pas franchement discret. Ce n’est clairement pas un objet à mettre dans sa chambre si on veut dormir tranquilement. Mais ça reste un ventilateur, ce qui signifie que le bruit est assez régulier. Donc, pour peu qu’on ne soit pas hypersensible, on l’oublie au bout d’un moment.
Je vous disais que je voulais avoir une sonde température/humidité. Je dois reconnaître que celle que j’ai choisi ne m’inspirait pas une grande confiance. Mais seule l’expérience peut dire ce qu’il en est.
Les résultats
Voici quelques photos de l’utilisation. J’ai essayé les différentes températures entre 45° et 70°. Pour vérifier l’afficheur, j’ai mis en parallèle un thermomètre de cuisine à peu près fiable, de façon à comparer les températures théoriques, celles affichées par la sonde pas chère et celle, plus réalistes, du thermomètre de cuisine. Je n’ai pas pu faire la même chose sur l’hygrométrie car je n’avais pas d’hygromètre de qualité sous le coude.
Pour les températures de 45°, 52° et 60° j’ai pris la mesure au bout de 15mn de chauffage. Pour la température de 70° (maximum de l’appareil) j’ai pris la mesure au bout de 15mn, 30mn et 45mn en constatant au bout de 15mn que je n’avais pas atteint la valeur attendue.
Réglage de température | Mesure au bout de… | Valeur affichée par la sonde | Valeur affichée par le thermomètre de cuisine |
---|---|---|---|
45° | 15mn | 46° | 48° |
52° | 15mn | 48° | 49° |
60° | 15mn | 53° | 55° |
70° | 15mn | 57° | 61° |
70° | 30mn | 61° | 64° |
70° | 45mn | 61° | 64° |
La première chose qui apparaît c’est que la sonde à 6€ donne des résultats, certes décalés, mais assez cohérents avec la thermomètre de cuisine. Ce n’est pas hyper précis mais ça donne une idée.
La deuxième chose c’est que cet appareil, en tout cas mon modèle, n’arrive pas à atteindre les 70° promis. Il plafonne à 64° maximum au bout d’une demi-heure.
En reprenant le tableau des matériaux, cela signifie qu’il faut régler l’appareil sur :
- 60° pour PLA, TPU/TPE, PP
- 70° pour ABS, PETG, ASA, HIPS
- poubelle pour PC, Nylon et PVA
En ce qui concerne le comportement sur la durée, j’ai séché une bobine de PETG pendant 6h à 70° théoriques, donc en fait 65°, sans aucun problème ni affaissement de mes rehausseurs. Sur cette bobine j’ai gagné 2 grammes d’humidité. C’est peu mais elle était pleine aux trois quarts et elle reste tout le temps dans son sac congélation.
Conclusion : est-ce que ça vaut le coup ?
Est-ce que ça vaut le coup d’utiliser un déshydrateur alimentaire pour sécher ses filaments ?
Si on se place sur le plan de la facilité, du prix et du fonctionnement, je dirais oui sans hésiter. C’est bien moins cher qu’une boite dédiée (à part pour les veinards qui ont eu une promo à 30€) mais qui, je le rappelle, ne sèche pas les tomates !
Les températures sont conformes à quelques degrés près et je m’attendais à pire avec cette sonde. Pour être tout à fait honnête je trouve que la sonde n’est pas vraiment utile (mais ça fait nettement plus joli). Le plus important est qu’avec cet appareil, on peut sécher tous les filaments courants. Ce qui est quand même le but de base.
Sur le plan de l’utilité, je dirais que ça se discute. Comme je le disais, ce type de montage n’est pas fait si vous voulez sécher au fil de l’impression, ou si vous voulez le mettre à côté de votre imprimante.
Quand les bobines sont bien stockées (dans des sacs avec sachet absorbeur et dans une pièce à vivre), elles prennent peu l’humidité. Dans ce cas, cet appareil est loin d’être indispensable. Mais il peut vous sauver quelques bobines qui ont pris l’humidité chez le fabricant par exemple.
Si vos bobines sont stockées dans un garage, en revanche, cette appareil me semble nettement plus utile.
Voila. Vous avez les éléments pour vous décider. Personnellement je ne regrette pas mon achat. Et j’attend les premiers bons fruits pour utiliser la partie alimentaire. Mais ceci est une autre histoire…
Si vous voulez discuter de ce sujet, je vous attends dans le groupe Facebook de Docarti.